be my guest - briar et alice

be my guest

La nuit commence doucement à envahir les rues, déposant son voile noir que seuls les éclairages publics parviennent à traverser. Accompagnée d'un sourire, Alice tend à son dernier client une petite pochette dans laquelle se trouve son mélange d'herbes. Un mélange spécialement conçu pour lui. Il n'avait jamais mis les pieds dans une herboristerie, avant ce jour-là, lui avait-il expliqué, mais ses migraines refusaient de passer malgré son traitement habituel. Alors Alice avait sélectionné soigneusement chaque ingrédient, tout en lui indiquant à quelle température exacte porter l'infusion pour que les propriétés des plantes agissent au mieux.

« Bonne soirée à vous, faites attention en rentrant. » glisse-t-elle à son intention, tout en encaissant le montant de l'article. « Et n'hésitez pas à me donner des nouvelles, on pourra réarranger la composition si ce n'est pas assez efficace. » L'homme acquiesce. Sceptique, probablement, mais l'hybride est assez sûre d'elle sur ce coup là, l'encourage d'un nouveau sourire à lui faire confiance. Elle connaît les propriétés des plantes mieux que personne et elle espère que cette sélection fera son travail.

Son client fini par quitter la boutique et Alice soupire longuement avant de s'étirer. La journée a été longue. Productive, mais longue. Un rapide coup d’œil à son téléphone lui suffit à voir qu'elle a dépassé l'heure à laquelle Vilice est censé fermer. Victoria est partie depuis longtemps, laissant à Alice le soin de fermer la boutique. Non pas que ça la dérange, bien au contraire. Rentrer chez elle, dans cette maison qui a abrité tant de leurs souvenirs, l'embête bien plus que de faire des heures supplémentaires. Un léger sourire vient brièvement éclairer son visage, cependant, quand avec l'heure un message de son père lui accroche le regard. Elle pianote quelques mots pour lui répondre, lui assurer que tout va bien. Elle ne pourra jamais l'empêcher de s'inquiéter, elle le sait.

Surtout pas avec ce qui est en train de se passer actuellement, les tempêtes et les séismes qui inquiètent tout le monde. Elle la première. Car elle sent bien que quelque chose n'est pas naturel, pas normal dans tout ce qui arrive. Elle sent que la Terre est en proie à bien plus de choses que de simples phénomènes naturels. Elle ne peut pas être dupe. Et, machinalement, elle envoie un texto à Victoria, juste pour s'assurer qu'elle va bien. Soupire devant le simple « Oui. » qu'elle reçoit en réponse, balayant tout de cette complicité qu'elles ont eu pendant si longtemps. La brune ferme les yeux quelques secondes, inspire profondément. Tente de ne pas se faire une montagne de la froideur de ce message. Et le tintement de la clochette de l'entrée lui fait rouvrir les paupières.

« Je suis désolée, j'allais fermer ! » lance-t-elle à la personne qui vient d'entrer, clôturant sa caisse avant de contourner les grandes étagères en bois qui abritent toutes sortes de bocaux et d'herbes séchées. « Bree ! » lance-t-elle, le visage s'éclairant. « Pardon, je ne savais pas que c'était toi. » Voir le visage de Briar chasse les autres pensées. Celles autour des phénomènes qui agitent San Francisco, celles autour de Victoria. Alice est sincèrement heureuse de la voir. « Tu avais besoin de quelque chose ? »

Elle peut faire une exception. Repousser encore un peu la fermeture du magasin si la sorcière en a besoin. Saisir l'opportunité, finalement, de ne pas se retrouver seule. Machinalement, elle vient serrer Briar dans ses bras, très brièvement. Sa manière à elle de saluer les personnes qu'elle apprécie. « J'allais fermer et aller au P3. Tu m'accompagnes ? »

La perche lancée avec le visage éclairé d'une petite lueur amusée, Alice décide que cette soirée sera belle, convaincue que le bien attire le bien et que les pensées ont une force de réalisation que l'on sous-estime trop souvent. Et elle profite de l'attente de la réponse de la blonde pour terminer ses petits rituels de fermeture, avant de finalement sortir du magasin et laisser l'air frais de l'extérieur lui glisser sur la peau. Oui, cette soirée a la possibilité d'être belle, elle en est convaincue. Il faut bien que les choses le soient, parfois et Alice a fondamentalement besoin de positif dans sa vie, en ce moment.

feat @briar bishop

Une journée calme, Amos en service à la librairie, c'est un moment propice pour Briar d'aller faire un tour en ville. Elle s'est occupée de plusieurs emplettes au travers de San Francisco, réglant quelques obligations administrative. Le tout avec l'intention de finir la journée aux alentours du Financial District. Une opportunité provoquée d'aller rendre une visite à Alice, son herboriste préférée ! Une sorcière dont elle s'est rapprochée, s'en faisant une amie loyale avec qui Bree aime passer du temps.

Libre de toute obligation, Briar franchit le seuil de la boutique, un sourire amusé aux lèvres à la remarque de la tenancière. Son sourire s'épanouit en entendant Alice la reconnaître, prononçant son surnom avec cette affection caractéristique de la jeune femme. Briar accepte tout naturellement l'étreinte d'Alice. La libraire se sent toujours chez elle ici, entourée des herbes et des parfums apaisants qui imprègnent l'air. L'herboristerie est un refuge pour Bree, surtout quand elle est égayée par la présence de son amie.

— C'est gentil, Alice. Je n'avais pas vraiment besoin de quelque chose en particulier, je passais simplement dans le coin, alors j'en ai profité pour venir te voir, avoue-t-elle avec un léger haussement d'épaules et toujours ce sourire lumineux.

La proposition d'Alice s'accompagne d'une petite virée au P3, un nightclub que Briar fréquentait de temps à autre. Cette invitation ne peut pas tomber mieux ! Bree a bien besoin d'extérioriser le stress de ces derniers jours, avec tous ces événements étranges qui s'abattent sur la ville sans raison apparente. L'anticipation d'une soirée agréable en compagnie de son amie est une occasion à ne pas manquer.

— Ce serait super ! J'ai justement besoin de me détendre un peu, répond Briar avec enthousiaste.

Elle observe Alice terminer les dernières tâches de fermeture, admirant son calme et sa compétence dans ce qu'elle fait. Elle lui fait penser à un écho d'elle-même. Avec plus de dix ans de moins, c'est sûr ! Mais l'âge n'a jamais été une question dans l'esprit de Briar. Le fait d'avoir pour meilleur ami son neveu tout juste entré dans la trentaine doit aider. Elle est toujours impressionnée par la connaissance d'Alice en matière d'herbes et de mélanges, une expertise qui a souvent été d'un grand secours. Alice semble pouvoir sentir de quoi chaque personne qui passe la porte a besoin.

Une fois dehors, Briar, ravie de pouvoir profiter d'un moment de répit avec Alice, prend son amie par le bras.

— Allons embrasser la nuit pour oublier les peines du jour !

Bree sent le poids de ses préoccupations s'alléger alors qu'elles se dirigent vers le P3. De quoi présager une soirée de musique, de rires et de détente.

be my guest

Briar a toujours fait partie, aux yeux d'Alice, de ces personnalités lumineuses dont elle aime s'entourer. Le genre de personnalité qui parvient à apaiser un peu les tumultes du quotidien en un sourire, comme si le monde entier devenait plus léger en sa présence. Une amie, à laquelle la demi-nymphe tient tout particulièrement. Encore plus lorsque celle-ci semble dans la même dynamique qu'elle. Sortir, faire la fête. Oublier les déboires du jour pour confier leur sort à la nuit... Le sourire d'Alice ne fait que s'éclairer davantage, l'invitation acceptée venant alléger d'autant plus sa soirée. Sortir seule n'a jamais été amusant mais la perspective d'une soirée avec Briar a quelque chose de presque euphorisant.

« Moi aussi... » répond d'ailleurs la plus jeune, avant qu'elles ne se retrouvent dehors. La main d'Alice vient se poser sur celle de Briar, là, contre son bras. Tactile, la demi-nymphe l'a toujours été, de manière naturelle. Elle pense sincèrement qu'un câlin peut vaincre tous les maux du monde et qu'un contact physique bienveillant est parfois plus efficace que des mots maladroits. À cet instant, elle savoure juste la présence de son amie à ses côtés, la chaleur de sa peau contre la paume de sa main et la perspective d'une soirée entière ensemble. « J'aime beaucoup ce programme. » s’enthousiasme-t-elle dans un petit rire, tout en marchant d'un pas régulier.

« Je paye la première tournée ! » lance Alice, alors que le P3 se dresse enfin devant elles, comme un appel à la détente après une dure journée de labeur. Le ton est enjoué alors qu'elle se tourne vers son amie pour étirer ses lèvres en un large sourire solaire, fière d'avoir été la plus rapide à le dire.

La musique vient cogner contre ses tympans à la seconde où elles entrent dans le club et la moue d'Alice ne se fait que plus solaire encore. Ce soir, elle met ses problèmes de côté. Tout, du divorce à la chasse aux démons. Elle veut juste ranger tout ça dans le fond de son cerveau, oublier l'existence de ce qui la perturbe, ne serait-ce que pour quelques heures.

Elle n'oublie néanmoins pas de sortir son téléphone pour y pianoter rapidement un texto qu'elle envoie à Borée. Simplement pour le prévenir qu'elle rentrera tard, ce soir. Et lui demander de nourrir l'armée d'animaux qui cohabitent avec eux, sans avoir la garantie qu'il parvienne à lire le message. Quoi qu'il est devenu doué avec un téléphone dans les mains... Et la pensée lui arrache un très léger rire tandis qu'elle range son portable pour se diriger vers le bar.

« Un mojito, s'il vous plait ! » lance-t-elle, toute heureuse. Comme si le poids des responsabilités avait disparu à la seconde où elle avait mis les pieds à l'intérieur de l'établissement. « Oh, j'adore ce morceau ! » fait-elle remarquer alors que la musique entraîne déjà quelques danseurs téméraires sur la piste.

Piste que la brune regarde déjà avec envie. Difficile pour elle de tenir en place lorsque l'envie de bouger se fait sentir. Pourtant, elle reporte son attention sur Briar tout en venant siroter une première gorgée de sa boisson. « Comment va Amos ? Et, surtout, comment vas-tu ? » demande-t-elle, pour lancer la conversation. « Il faudrait que je passe vous voir, à la librairie. J'ai été pas mal occupée, ces derniers jours, entre la boutique et... le reste. » Sa phrase est ponctuée d'un très léger rire. Nul doute que Briar saura exactement ce qu'est ce reste en question, sans que la brune n'ait besoin d'expliciter.

Et, finalement, un sourire plus malicieux se met à naître sur ses lèvres alors qu'elle se met à regarder derrière l'épaule de Briar. « Sois discrète... Mais je crois que le charmant jeune homme derrière toi t'a repérée. Il n'arrête pas de te fixer depuis qu'on est entrées. Et je suis sûre que c'est toi qu'il fixe, à son air concentré et à sa façon de jouer avec son verre en détournant le regard dès que tu fais mine de pouvoir l'apercevoir... » Ce genre de remarque résonne d'une innocence joueuse entre les lèvres d'Alice. Ça l'amuse de voir ce genre de petits détails, là où certains ne les auraient peut-être même pas soulevé.

« Il est plutôt mignon, si tu veux mon avis. » Elle ne cherche pas à jouer les entremetteuses, ne s'attend d'ailleurs pas vraiment à ce que Briar décide d'aller voir l'homme en question. Elle savoure juste cette impression de n'avoir aucune autre préoccupation que celle-ci, acceptant pour ce soir de quitter les responsabilités du monde des adultes tout en espérant réussir à entraîner son amie dans sa petite régression.

feat @briar bishop

Briar ressent la chaleur de la main d’Alice sur son bras et trouve un réconfort apaisant dans ce simple contact. La perspective d'une soirée avec son amie a toujours eu le pouvoir d'alléger le poids de ses préoccupations, et ce soir ne fait pas exception. Alors qu'elles approchent du P3, un sourire doux et mélancolique flotte sur les lèvres de Bree, elle aime profiter de ces moments qui l'éloignent de son quotidien sans le transcender pour autant. La routine est probablement ce qui la fait tenir debout (ça, et les nuits passées à se plonger dans les visions du passé...).

— Voilà qui est très généreux ! J'accepte si tu me laisses payer la deuxième, dit-elle avec un sourire amusé en entrant dans le club.

La musique vibrant dans l'air l'enveloppe, comme une caresse. Les souvenirs de soirées passées ici avec Andrew surgissent brièvement, mais Bree les chasse rapidement. Ce soir, elle a décidé de laisser les fantômes du passé derrière elle, au moins pour quelques heures. Alors qu'Alice s'installe au bar pour commander, Briar laisse son regard errer sur la piste de danse, s'imprégnant de l'énergie qui l'entoure. Le P3 est un endroit qui a su s'adapter tout en restant intemporel. L'héritier en charge fait un travail exceptionnel en maintenant ce club.

— Un mojito aussi, merci, ajoute Briar à l'intention du barman avant de se tourner vers son amie.

La question d'Alice sur Amos et son propre bien-être attire un sourire reconnaissant sur les lèvres de Bree. Son amie s'est toujours montrée concernée et soucieuse de son bien-être. Et pas seulement au travers de ses plantes.

— Amos va bien, il gère la librairie comme un pro. J'ai beaucoup de chance de l'avoir à mes côtés. Même s'il devient difficile de l'éloigner des conflits contre le mal... Je suppose que par sa nature, cette guerre est inscrite dans son ADN, déplore Briar en haussant les épaules. Je ne peux pas lui en vouloir, et je ne vais pas l'empêcher de mener sa vie comme il l'entend. Je suis seulement sa tante ! Ajoute-t-elle avec un grand sourire, démontrant la fierté qu'il lui inspirait.

— Quant à moi, tout va pour le mieux, répond-elle en reportant son regard sur le barman qui préparait les mojitos. On a tous été un peu débordés ces derniers temps. Ça me ferait plaisir de te voir plus souvent à la librairie, mais traverser la ville n'est pas une partie de plaisir, alors il faut trouver le temps.

Le regard d'Alice change soudain, devenant malicieusement attentif. Briar suit son regard et son cœur rate un battement à la mention de l'homme qui l'observe. Une teinte de rouge colore légèrement ses joues tandis qu'elle détourne rapidement les yeux. Depuis la perte d'Andrew, Bree n’a jamais laissé une personne entrer dans son cœur, et les avances d'autres hommes n'ont jamais abouti à plus que quelques échanges de regards et des flirts timides. Dès que la situation devient plus sérieuse, la libraire se focalise sur ces nuits passées à revivre les souvenirs qu'elle a d'Andrew. Esclave de ses pouvoirs qui l'ont empêchée de sombrer dans l'abîme, mais qui l'empêchent aussi d'aller de l'avant. Cela va faire onze ans, et rien n'a jamais pour Briar.

— Alice, voyons ! Dit-elle, flattée et embarrassée. Tu sais bien que je ne suis plus vraiment dans ce genre de jeu. C'est... flatteur, mais il fait bien de rester au loin, ajoute-t-elle en souriant.

Elle sait qu'Alice comprend sa réserve, sa pudeur sentimentale. Et c'est peut-être par cette conscience qu'elle pousse Bree au vice, cependant, il en faudra plus pour que la blonde passe au-delà de cette retenue. Briar se garde de confier sa dépendance au passé, mais son air mélancolique et son mode de vie sont suffisants pour qu'une amie comprenne que ce n'est pas une situation qui peut durer. Ce qui est arrivé à Andrew est tragique, mais Bree a sacrifié une partie de sa jeunesse à se renfermer sentimentalement parlant. Il n'aurait jamais souhaité ça. Néanmoins, la présence d'Alice, le rire partagé et le réconfort silencieux de leur amitié sont tout ce dont Bree pense avoir besoin ce soir.

— Il y a d'autres façons de passer une soirée mémorable, ajoute Briar avec un clin d'œil complice, espérant détourner l'attention d'Alice vers une autre source de divertissement.

Le barman, efficace et jovial, apporta les deux mojitos fraîchement cuisinés. Briar leva son verre pour trinquer, prête à laisser les soucis et les souvenirs pesants de côté, ne serait-ce que pour une nuit.

— A notre santé !

BE MY GUEST
@briar bishop & @alice martinez

« Deal. » glisse-t-elle avec un sourire, pour laisser le deuxième tour à son amie. Heureuse de savoir d'avance qu'il y aurait un second verre, que la nuit ne fait que commencer. Elle se laisse entraîner dans l'ambiance du P3 tout en tentant d'y laisser à l'entrée ses propres problèmes, tout ce qui pourrait l'empêcher de profiter d'une bonne soirée. Elle a bien mérité un moment pendant lequel faire taire ses pensées. Un moment pour penser à autre chose qu'à Victoria et son départ, qu'au vide laissé dans la maison et à tous ces nouveaux repères à reprendre maintenant qu'elle est partie. Alice va de mieux en mieux, a le mérite de ne pas avoir perdu l'éclat solaire qui illumine ses sourires... mais le divorce continue de lui peser. Continue de remuer des choses, en elle, de semer un certain chaos dans ses pensées. Victoria aurait pu être là, ce soir. Elle aurait pu entendre son rire, la voir s'entendre avec Briar.

Mais elle n'est pas là et la brune décide de reporter toute son attention sur son amie, acquiesçant tranquillement à ses mots. « Je suis sûre que tout ira bien pour lui. Il est talentueux et je ne doute pas qu'il saura faire face à tout ce qui l'attend dans cette lutte... » La sincérité transperce dans le ton de sa voix. Amos est une personne qu'Alice apprécie beaucoup, à l'instar de sa tante. Quelqu'un qui a toujours su avoir une certaine importance dans sa vie. Non pas qu'il soit difficile d'entrer dans la vie d'Alice et de s'y faire une place, mais la demi-nymphe n'en chérit pas moins chaque relation pour ce qu'elles sont individuellement. Victoria tendait parfois à lui reprocher le temps qu'elle pouvait accorder aux autres, cette gentillesse désintéressée qui pouvait la faire se lever au milieu de la nuit juste pour aller consoler quelqu'un. Alice comprend, maintenant, que ça n'a pas dû jouer en sa faveur, que ce temps accordé à d'autres aurait peut-être pu servir à sauver son couple. Pourtant, elle serait incapable de faire autrement. Incapable de seulement ne pas se soucier d'autrui comme elle le fait.

« Je n'ai aucune excuse, je n'habite pas si loin de la librairie, pourtant... Mais je ne vois pas les journées passer... Il parait que je dois lever le pied sur les heures supplémentaires. » lance la brune dans un petit éclat de rire. « Ça me manque, de passer. De passer du temps avec Amos et toi aussi, d'ailleurs. »

Et ça lui ferait du bien, de faire autre chose que le trajet entre chez elle et l'herboristerie. De se sortir aussi un peu la tête de sa quête identitaire, qui prend de plus en plus de place, elle aussi. Alice n'est pas fait pour trop se renfermer sur elle-même, pour vivre loin de ceux qu'elle apprécie trop longtemps. Elle a besoin d'être entourée, de pouvoir rire et partager avec d'autres personnes, au risque d'avoir la désagréable impression de se faner lorsqu'elle passe trop de temps seule. Et elle a cette tendance à penser que tout le monde fonctionne comme ça. Cette tendance à penser que les gens sont malheureux seuls, même lorsque ce n'est pas totalement le cas. C'est peut-être pour ça qu'elle remarque si facilement les œillades intéressées en direction de son amie. Parce qu'elle ne veut pas que Briar soit seule.

La réaction de la libraire, d'ailleurs, fait légèrement sourire la demi-nymphe. Elle comprend, oui. Elle ne sait pas comment elle réagirait si elle-même devait se retrouver à la place de Briar. Sûrement aurait-elle rougit également. Sûrement aurait-elle aussi préféré que l'homme se tienne à distance raisonnable. « Ne t'en fais pas, je ne comptais pas lui faire de grands signes pour qu'il nous rejoigne. On est très bien toutes les deux. » dit-elle en riant légèrement. « Mais si jamais tu changes d'avis... » Elle laisse sa phrase en suspens en haussant légèrement les épaules, une certaine espièglerie dans le regard. Alice ne forcerait jamais personne à faire quelque chose qu'il ne veut pas faire, Briar doit certainement le savoir. Ça ne l'empêche pas de soulever des évidences. Parce que la blonde mérite de savoir qu'elle plait, Alice en est convaincue.

Elle reste amusée par la façon dont Briar tente de détourner son attention et acquiesce sans se départir de son sourire. Son verre dans les mains après avoir payé pour les deux, elle trique joyeusement avec son ainée. « A nous et à cette soirée ! » lance-t-elle, en prenant une première gorgée de son mojito. Une boisson qu'elle a toujours aimé. Alice n'est pas très portée sur l'alcool, mais la fraîcheur de la menthe et la douceur du sucre lui ont toujours fait aimer le goût léger du rhum.

« Je vais bientôt avoir un nouvel arrivage de plantes de Colombie ! Mes cousins ont été adorables et m'ont fait une petite sélection pour l'herboristerie. » lance-t-elle. « Dont des articles assez rares et assez efficaces pour créer un talisman de protection. Je pourrais t'en faire un, pour la boutique ! J'ai l'impression que c'est Noël avant l'heure, je n'attends plus que ça depuis des jours. Il y a des exclusivités qu'on ne trouve que dans certaines régions colombiennes, j'ai hâte de les avoir en main ! » Il y a quelque chose qui s'éclaire sur son visage, lorsqu'elle parle des plantes. « Et j'ai pu récupérer quelques graines de Victoria Amazonica... Je compte installer un bassin dans mon jardin, ils seront parfaits pour l'habiller. »

Le choix n'est pas innocent et la demi-nymphe s'en rend compte en prononçant le nom du nénuphar géant. Tout la renvoie à Victoria... Est-ce que les peines de cœur guérissent seulement un jour ? Ou sont-elles toujours là, présentes, laissant des cicatrices indélébiles que seul le temps parvient à apaiser sans jamais parvenir à les faire disparaître ?

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