highway to hell (w/ peter walters)

La nuit avait terminé de recouvrir San Francisco de sa cape ténébreuse et la pollution nocturne ne permettait pas à la nymphe d’observer les étoiles.
De l’autre côté du trottoir, elle baisse les yeux de la voûte céleste pour voir les bâtiments humains jusqu’à ce que ses prunelles sombres ne se posent sur l’enseigne lumineuse du bar.
Elle avait déjà servi dans des bars, mais rien d’aussi malfamé. Non pas qu’elle juge quiconque -pas en face à face en tout cas-, juste les choix de vie de son protégé: parce que si la vie avait été dure avec elle, rien ne l’avait préparé à endosser le rôle de figure maternelle. Par chance, elle ne pensait pas avoir eu une vie si dure et il n’y avait rien que la nymphe se pense incapable de réaliser. Tout ce dont elle avait besoin, c’était du temps, un placement stratégique de ses pions et de ses mouvements, et surtout la connaissance. Parce que selon elle la force brute ne permettait rien sans le savoir: c’est du moins ce à quoi elle pensait pour se rassurer en franchissant finalement la route malgré le feu tricolore rouge et le brouhaha des klaxons, d’un embouteillage qui est déjà derrière elle lorsqu’elle se glisse dans la fil d’attente du bar.

Elle laisse traîner ses curieuses oreilles autour d’elle, à l’affût de la moindre information qui pourrait lui avérer utile.
Des choix stupides ? Elle en avait toujours fait. Se rendre seule dans un bar de démons, repère de malice, et de débauche ne figurait même pas dans son top dix. Elle faisait un pas à chaque fois que l’entrée se rapprochait jusqu’à faire face aux deux vigiles, affichant un large sourire plus sinistre qu’autre chose. Elle avait tiré ses cheveux noirs en une queue de chevale stricte qui dévoilait son visage anguleux et tirait ses traits, toujours tout de noir vêtue dans un simple pantalon et un col roulé lui serrant le cou. Elle avait minimisé les fantaisies, désireuse de se fondre un minimum dans la masse.
Alors les deux vigiles la laissent rentrer et Galina peut commencer son avancée dans l’Asp Hole.
Depuis combien de temps Peter travaille-t-il ici ? Elle n’en sait rien, déjà trop temps à son goût.
Mais les Mamans du country club avaient été formelles avec elle: ne surtout pas forcer un adolescent sur une voix qui n’est pas la sienne.

Elle observe avec une certaine attention les murs composés d’une pierre noire et les luminaires rougeoyants: pouvait-il y avoir plus cliché ? Les talons de ses bottes résistent à chacun de ses pas, collent à un mélange d’alcool, de transpiration, sûrement de nombreuses autres choses. Certains regards se tournent sur elle mais elle s’en moque, elle continue d’avancer à mesure que la musique se fait toujours plus forte en ignorant les alcooliques dans un coin et les lubriques dans l’autre.
Lorsqu’elle s’extirpe d’un long couloir, elle arrive finalement dans le ventre de la bête.
Au centre se trouve le bar qui expose ses nombreuses bouteilles et plus loin, une chaise vide.
Non, un trône.
Puis elle trouve enfin Peter derrière le bar, en train de remplir des verres et d’en rincer d’autres.
Mais elle ne va pas à ses devants immédiatement, les sens de l’hybride lui permettront sûrement de flairer l’odeur de la nymphe mais entre les corps et les fluides corporels, elle avait une petite marge pour observer l’incube-garou en toute discrétion. Le pire dans le tableau qu’elle contemple, c’est que Peter a l’air d’être dans son véritable élément: la nymphe ne devrait pas se soucier des penchants moraux de son fils protégé, mais dans des temps toujours plus incertains Galina n’était pas très enchantée à l’idée de savoir Peter si proche des flammes.
Rien ne l’empêchait de s’en tenir un peu plus éloigné, à bonne distance, prêt à pouvoir prendre la tangente au moindre pépin.

En arrivant au bar, elle remarque Peter penché au-dessus du bar, souriant et murmurant des paroles qui lui sont inaudibles aux oreilles d’un garçon. Son menton retenu dans la paume d’une de ses mains, elle vient claquer avec ses doigts à l’attention de Peter avant de hausser un peu plus la voix “Hum, excuse yourself maybe !?” qu’elle hèle, perchant sa voix au-dessus de la musique d’ambiance avant de finalement voir le visage de Peter se tourner vers elle. Elle affiche tout à coup un large sourire en agitant sa main, ses longs doigts squelettiques “Why aren’t you being a good boy and pour your Mama a martini ?” elle tourne les yeux vers l’autre client et lui envoie un clin d'œil qui met mal à l’aise.


En faisant tapoter ses ongles noires et pointues sur le bar, elle se redresse un peu plus lorsque Peter se rapproche pour l’enlacer férocement “Say… That’s one kind of bar you work in. Now I understand why I never got a invit…” elle observe à sa droite un démon qui ne fait que passer, elle tourne sur son tabouret pour l’observer de haut en bas avant de refaire face à Peter “Thank you. Really.” finit-elle en hochant la tête dans un soupir “Where’s my martini already ? I had a long day.” qu’elle lance un peu plus sèchement en regardant autour d’elle dans un savant degré de curiosité et d’un léger dédain.

Cela faisait quelques années qu'il travaillait en temps que barman. D'aussi loin qu'il se souvienne, il avait rejoint le Asp Hole peu de temps après la ressurection de sa mère. Et pour cause - il n'avait plus réellement trop de raisons de travailler au cimetière. Curieusement, il avait gardé son statut de fossoyeur, demandant à ne travailler que la journée. Les soirées au cimetière étaient maintenant beaucoup plus sinistres depuis que sa mère étaient revenu. Et en rejoignant ce bar, il avait enfin l'impression de s'acheter une seconde jeunesse. Il ne pouvait pas prétendre qu'au début, il était à l'aise mais Kaïden lui avait fait confiance, l'avait guidé, suggéré, conseillé et comme attiré par son charme, Peter avait suivi la danse. Il avait vu en lui à la fois un mentor, un père et un amant.

A chaque fois qu'il travaillait dans ses lieux, il se sentait différent, en décalage et cette version de lui lui plaisait : plus assuré, plus confiant, plus séducteur, et en général, plus enclin à faire le mal. Les clients habituels finissaient par le connaitre et la réciproque s'installait. Et d'un coup, comme un rappel à son ancienne réalité, il entendit un claquement de doigt, regardant l'air sombre celle qui venait de l'interpeller. What are you doin' here ? pensa-t-il. “Mother !” dit-il d'un ton cynique. Elle faisait tache dans le décor. Et surtout, il ressentait avec dégout de la honte qu'elle le voie ainsi. Mais par politesse - et surtout par habitude - il vint l'enlacer presque froidement avant de se détacher d'elle, revenant derrière le comptoir pour commencer à concocter un martini. “Yes, this is why” répliqua-t-il sèchement alors qu'il vit le démon qu'il était en train de séduire partir à l'envolée. Se dépêchant de préparer la commande de sa mère, il répondit expressément. “It's comming...” alors qu'il finissait de donner la touche finalement avant de présenter le verre comme il se devait. Il espérait qu'elle parte assez vite, ne voulant pas l'avoir dans les pâtes et il réalisa que c'était peut-être la première fois qu'il ressentait ce qu'elle avait ressenti avec lui, petit. “So... what are you doin't here ?” demanda-t-il, curieux. “I mean... it's not a place for an old lady like you” dit-il, en hochant les épaules. Il entendit les cris d'un démon l'interpellant pour une commande. Tous s'excitaient, devenaient impatients. “Sorry... commin' back” dit-il alors qu'il voyait là l'opportunité de fuir - ne serait-ce que quelques instants - pour préparer la boisson d'un autre.

Qu’est-ce que ça pouvait bien lui faire que Peter travaille dans un bar à démons ? Bar à démon ayant pour patron la Source du Mal ? Ce fait s'inquiétait autant qu’elle trouvait ça ridicule.
La Source du Mal tient un bar ?
Beaucoup de choses semblaient avoir eu lieu au cours de ses vingt années passées sous terre. Sa relation avec Peter n’avait pas fait exception au changement: pour celle qui n’avait jamais aspiré à devenir un jour mère, elle se retrouvait aujourd’hui dans une position incertaine et manquant cruellement de contrôle. C’était à la fois dégradant pour elle, mais aussi effrayant “It’s not coming fast enough !” qu’elle renchérit sur les paroles de l’hybride et remarque le flirt de ce dernier se relever pour disparaître, partir aux devants d’autres garçons “It’s definitely coming faster than you tho.” qu’elle vient placer en tapant le bar de la paume de sa main, lâchant un rire sec avant de prendre une moue dégoûtée en observant sa main. Elle se penche au-dessus du bar pour se saisir d’un morceau de tissus et se frotter les phalanges avant de sourire à la vue du cocktail “Thank you, so much. I said I had a LONG. DAY.” elle articule avec exagération chaque syllabes “Aren’t you gonna ask me how was my day ?” elle joue avec le cure-dent ayant servi à empalé une olive en relevant ses yeux vers Peter. Elle porte le verre à ses babines écarlates et laisse l’alcool lui brûler la trachée, espère que Peter inhume mieux les cadavres qu’il ne dose les alcools avant de presque s’étouffer en entendant sa pique; C’es de bonne guerre, plus d’une mère jugerai Galina, mais elle estime avoir fait un bon travail, plus que ce qu’une succube et une meute indignée aurait fait du pauvre Peter en tout cas.

Elle grogne lorsque Peter lui tourne le dos et termine son verre d’une traite. Se relevant et avec un sourire mutin sur les lèvres, elle se retire et vient garder ses distances un bref instant. Dans la périphérie de son regard, tandis que ses yeux alternent entre Peter et le client infecté, elle remarque un démon s’approcher d’elle. Elle ne détourne pas son regard de glace et balance un “Non.” autoritaire, dissuadant le démon qui fait demi-tour lorsque Galina observe enfin Peter transportant un plateau se rapprocher de la table du client avec non pas un mais plusieurs pressions ainsi que des shoters.
Elle était encore dans la file d’attente un peu plus tôt, lorsqu’elle a libéré les spores des premières feuilles déchues annonciatrices de l’automne. Elle a infecté plusieurs clients, laissant ses spores en dormance. Le client impatient figure parmi les heureux élus et lorsque Peter arrive à son devant avec sa commande; il ne faut pas bien longtemps pour que le démon se retrouve vite bien pâle, l’air hasardeux, presque en proie à des étourdissements.
Il n’a ni le temps de se lever, ni de se rendre aux toilettes, encore moins de comprendre; lorsqu’il se penche pour vomir au sol sur les chaussures de Peter. Certains clients sont dégoûtés et s’exclament, Galina fait partie des rares sales bêtes qui viennent ricaner. Elle revient à nouveau vers Peter, l’air de rien “Someone should clean that up. And change his shoes.” elle tourne la tête et montre une porte interdite aux clients, réservée au personnel “Is this where we can go speak somewhere quiet ?” elle rapproche un peu plus son visage pour murmurer à l’oreille de Peter “I’ll buy you another pair of shoes.” elle n’était pas totalement une emmerdeuse terminée avec son fils d’adoption. Lla démangeaison de vouloir rassurer et comprendre Peter était bien présente, mais Galina manquait cruellement d’expérience dans ce jeu là.

Même s'il parlait d'un volume qui se voulait raisonnable, il l'entendait hurler. Combien de fois lui avait-elle hurlé dessus ? Il ne l'avait pas pris pour de la haine ou de la détestation - et il était sûr que cela en était pas. Mais comme une voix qui hantait son esprit, il pouvait l'entendre hurler, avec les mêmes sons, les mêmes tonalités d'une vieille marâtre qui voulait tout ce qu'elle voulait quand elle l'avait décidé. Parfois, il aimerait lui dire de se taire, de fermer sa putain de gueule. Il en avait rêvé mais jamais - il se l'était promis - jamais il ne le lui dirait. Il souffla, serra du poing, voulut servir cet autre client avec un grand sourire, voulant lui faire des signes qui voulaient dire sauve-moi. Mais il n'eut pas la réponse escomptée et il le vit palir - mauvais signe - ou plutôt la fortune du destin qui sonna à lui. Et il se retrouva les chaussures pleines de vomi. Tout ce qu'il détestait, haïssait. “Fuck, fuck...” jura-t-il, l'air agacé. Et sa mère réapparut tel un esprit frappeur lui dictant encore et toujours ses moindres faits et gestes. Agacé, il répondit les mains en l'air. “Well, i'm working here, so i know” Il ferma les yeux un court instant, sachant pertinemment qu'elle n'abandonnerait pas. “Yes - but make it quick.” dit-il en ouvrant la porte pour l'inviter à entrer.

La porte fermée, il se débarrassa rapidement de ses chaussures mais il vit aussi tout le vomi en bas de son pantalon, obligé à se déboutonner pour retirer son bas avant de fouiner dans ses affaires s'il n'avait pas quelque chose d'autre à se mettre. Ne la regardant pas, il continua ses recherches “Okay, why you are here ? What do you want from me ? And please don't do your things with my clients. You're going to get me fired” Le ton était toujours énervé alors qu'il réussit à mettre la main sur ce qu'il semblait être un mini-short troué. Il haussa les épaules, l'enfilant. "... and i love working here. Finally, i can do something for myself." en référence à son travail effectué au cimetière pendant de longues années et qu'il prevoyait de quitter bientôt.